Sept ans après, le parquet a requis jeudi le renvoi de Coupat et ses amis en correctionnelle.
L'épicerie de Tarnac, en 2008. (Photo Marc Chaumeil. Divergence)
Le parquet de Paris vient de requérir le renvoi devant un tribunal de la bande de Tarnac, Julien Coupat en tête. Non pas pour avoir fomenté une entreprise terroriste, passible de vingt ans de prison devant une cour d’assises, mais plus modestement pour «association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste», passible de dix ans devant un tribunal correctionnel. De l’art de couper la poire en deux, de sauver une procédure mal embouchée.
«Hystérie». Simple dégradation de biens ou tentative d’attentat ? Dans la nuit du 7 au 8 novembre 2008, la pose d’objets métalliques contondants, non pas sur les rails mais sur les caténaires, visait à perturber la circulation des TGV et non à entraîner leur déraillement - aucune vie humaine n’étant mise en danger, selon les experts.
L’affaire Tarnac a défrayé la chronique judiciaire, mais aussi politique : François Hollande dénonçait en 2009 une «hystérie judiciaire», visant particulièrement la ministre de l’Intérieur de l’époque, Michèle Alliot-Marie, laquelle avait vilipendé une «mouvance anarcho-autonome de l’ultragauche».
Le réquisitoire du parquet tente, vaille que vaille, de sauver ce qui peut l’être. «La finalité terroriste du groupuscule ne saurait être nuancée par l’absence de victimes humaines.» A le lire, les Tarnac auraient monté «un plan concerté contre le réseau ferré», relevant d’une «volonté de déstabiliser l’Etat» français, pas moins. Des «faisceaux d’indices concordants», selon la terminologie consacrée, ont justifié amplement la mise en examen rapide de Coupat et ses amis du plateau de Millevaches (Corrèze) : certains s’étaient déplacés en voiture à proximité des voix ferrées durant la nuit litigieuse. Si cela suffit à diligenter des poursuites, c’est insuffisant pour condamner. Pour justifier leur renvoi devant un tribunal, le parquet en est réduit à l’insinuation, évoquant «l’éventualité de recourir à des engins» plus dangereux à l’avenir, risquant de «basculer dans le terrorisme».
«Infecte». Prévention ou répression ? La justice pénale n’a que faire de l’interrogation : elle juge sur des faits. Si la juge d’instruction en décide, bon courage au tribunal qui sera saisi. Julien Coupat a annoncé qu’il n’est «pas question de clamer notre innocence», mais de dénoncer une «infecte procédure pénale». Après avoir épousé sa compagne, Yldune Lévy, pour mieux contourner leur interdiction de se rencontrer.